Bruxelles Art Déco

Bar de L'Espérance, BruxellesBastion de l’Art nouveau, Bruxelles recèle aussi des trésors Art déco. La magistrale restauration de la villa Empain met les arts de l’Entre-deux-guerres en lumière.

Formes géométriques, style paquebot, décors exotiques … Partons découvrir l’Art déco belge à travers les rues de Bruxelles.

 

Flagey, ancien INR, Bruxelles
 
 
Les ambiances et les monuments Art déco de Bruxelles restent encore peu connus du public. La grande notoriété des ensembles Art nouveau éclipse les réalisations de l’Entre-deux-guerres.
Et pourtant, Bruxelles possède des maisons et bâtiments remarquables.
Ce patrimoine est même important puisque la ville a dû se reconstruire à bien des endroits après les dégats de la Première guerre mondiale.
Le parcours Art déco devrait séduire les amateurs d’art du XXème siècle.
 
 
Ecoutez (ou téléchargez) aussi l’émission que nous avons consacré à ce sujet :
 
 

 

Des maisons virtuoses

Les pièces de la maison du banquier David Van Buuren, bâtie dans la seconde partie des années 20, explosent de couleurs. Elles ont Salon de musique, maison Van Buuren, Bruxelles © Michel de Brayété réalisées par les meilleurs artistes et décorateurs de l’époque.
 
Rien n’a changé depuis la création de cette oeuvre totale qu’on visite avec des chaussons pour ne rien abîmer.
 
Transformée en musée en 1973 après la mort d’Alice Van Buuren, cette maison est un des plus beaux musées d’atmosphère de Bruxelles. Tout respire encore les Années Folles.
 
Mécène et amateur d’art, David Van Buuren a su magnifier ses intérieurs et ses coups de cœur artistiques en les unissant avec goût et subtilité. C’est le cas, par exemple, dans le hall d’entrée (voir photo ci-dessous).
Emmanuelle du Buisson, guide-conférencière pour l’association Arkadia (qui propose des parcours Art Déco), nous détaille ce mariage :
 
 
 
Fumoir, maison Van Buuren, Bruxelles © Michel de Bray Hall d'entrée, maison Van Buuren, Bruxelles © Michel de Bray Salle à manger, maison Van Buuren, Bruxelles © Michel de Bray
 
 
Salon, fumoir, salle à manger servent d’écrin à la collection de tableaux de David Van Buuren : Foujita, Max Ernst, Van Gogh, James Ensor, Guardi, Signac, Fantin-Latour…
 
La visite du musée permet aussi de mieux connaître l’œuvre de peintres belges du XXème siècle comme Gustaf Van de Woestijne. Cette figure de l’école de Laethem-Saint-Martin a beaucoup impressionné David Van Buuren qui a acquis presque une vingtaine de ses œuvres à l’expressionnisme mesuré.
 
On découvre aussi, accroché juste au dessus du canapé du salon, « la chute d’Icare », peint par l'atelier de Bruegel, chef d’oeuvre du XVIème siècle.
 
La maison est Labyrinthe, jardin de la maison Van Buuren, Bruxelles © Michel de Brayentourée d’un élégant jardin, prolongement naturel des décors intérieurs.
 
Jusqu’à sa mort, Alice Van Buuren n’a cessé de l’agrandir et d’imaginer des pièces végétales surprenantes comme le labyrinthe ou le jardin du cœur.
Le jardin et la maison Van Buuren se visitent tous les après-midi sauf le mardi.
 
 
Toujours au Sud de Bruxelles, sur la prestigieuse avenue Franklin Roosevelt, à l’ombre du Bois de la Cambre, la villa Empain vient d’être restaurée.
Villa Empain, Bruxelles © Georges de KinderAprès avoir subi de violentes dégradations, ce chef d’œuvre radical et somptueux de Michel Polak renaît comme à l’origine au milieu des années 30.
 
Cette villa hors-norme abrite désormais la Fondation Boghossian dédiée au dialogue des arts et cultures d’Orient et d’Occident. Les salles accueillent des expositions temporaires et conservent encore de remarquables décors comme le hall, le fumoir, une salle de bain ou le plafond de l’ancienne salle à manger.
 
Bâtie pour Louis Empain, un des fils du fondateur de la dynastie, cette villa fut vite désertée par son jeune propriétaire. Quelques temps après la fin des travaux, Louis quittait le luxe et partait vivre au Canada pour vouer sa vie à des œuvres sociales.
 
Hall de la villa Empain, Bruxelles © Georges de Kinder Plafond de la salle à manger, villa Empain, Bruxelles Villa Empain, Bruxelles © Georges de Kinder
 

Des immeubles aux lignes claires et profilées

Dans sa version la plus radicale et cubiste (qu’on appelle le Immeuble Art deco, BruxellesModernisme) ou à travers le style paquebot, l’Art déco est un des repères visuels de Bruxelles.
Il suffit de se promener dans le quartier Sainte-Catherine, sur les pentes du centre-ville, à Forest ou autour de l’avenue Coghen pour en être convaincu.
 
On est même surpris de retrouver, pour signer la Gare Centrale, un des maîtres de l’Art Nouveau : Victor Horta. Ce célèbre architecte, mort en 1947, a terminé sa carrière en dessinant des immeubles Art déco.
 
 
Ixelles possède aussi de beaux immeubles aux lignes droites et Flagey, ancien INR, Bruxellessobres. C’est également dans ce quartier que se trouve l’ancien Institut National de la Radiodiffusion (l’ex Maison de la Radio belge).
 
Ce bel exemple du style paquebot est désormais un centre culturel connu pour sa programmation des films et vidéos ainsi que pour ses concerts de musique classique, de musique du monde ou de jazz. Un seul nom à indiquer pour trouver l’endroit : Flagey (du nom de la place où il se trouve).
 
L’association Arkadia fait régulièrement visiter les lieux où les studios d’origine ont été restaurés. Retrouvons-y Emmanuelle du Buisson :
 
 
 
Entrée du personnel, Ancien INR, Flagey, Bruxelles Détail bureau du directeur, Ancien INR, Flagey, Bruxelles Détail d'un escalier,  Ancien INR, Flagey, Bruxelles
 
 
Le Résidence Palace, près du Parlement Européen, est typique des nouveaux immeubles de grand standing construits dans les années 20. Il possédait son propre théâtre, des restaurants, une piscine, une salle d’escrime et une autre pour la gymnastique.
Cette œuvre de Michel Polak abrite, entre autre, aujourd’hui le Centre de Presse International.
Etienne Matagne, guide-conférencier pour l'association Itinéraires, nous explique l'importance de ce bâtiment dans la vie bruxelloise :
 
 
 
En dehors du centre-ville, des cités-jardins expriment à la fois l’esthétisme, les recherches formelles et les idéaux sociaux de l’Entre-deux-guerres. La cité-jardin « le logis-Floréal » est particulièrement emblématique (à Boitsfort, square des Archiducs). A voir au printemps quand les arbres sont en fleurs.
 
 

Des décors célébrant l’Afrique

Dans l’Entre-deux-guerres, on raffolait de décors exotiques, Immeuble avec décor africain, rue A. Dansaert, Bruxellesfolkloriques et dépaysants. Si certains hôtels ou maisons particulières jouent avec les influences orientales ou méditerranéennes, d’autres mettent l’Afrique à l’honneur.
En pleine période coloniale, au moment où la RDC s’appelait le Congo Belge, les ambiances africaines étaient à la mode.
 
Sur la rue Antoine Dansaert, un immeuble accueille une jungle dans ses combles : palmiers, oranges et bananes colorés apportent une touche équatoriale à cette rue de Bruxelles.
On retrouve les bananes sur d’autres immeubles du même quartier. Elles sont aussi à l’honneur sur la place du Nouveau-Marché-aux-Grains, encadrant une tête d’africain.
 
Immeuble avec décor africain, rue A. Dansaert, Bruxelles Maison à décor africain, place du Noveau-marché-aux-grains, Bruxelles Immeuble avec décor africain, rue A. Dansaert, Bruxelles
 
 
Sur la place de Brouckère, la façade contemporaine du cinéma Salle de l'ex-Eldorado, multiplex UGC, place de Brouckère, Bruxelles © Bruno Brionimultiplex UGC, cache une grande salle abritant des bas-reliefs monumentaux d’où surgissent éléphants et buffles. Il ne manque que Tintin … au Congo !
C’est l’ancien cinéma Eldorado.
Aujourd’hui, le public vient surtout voir des blockbusters dans cette salle historique protégée par un vaste plafond aussi brillant qu’un soleil d’or.
 
 
A deux pas de la place de Brouckère, l’Espérance hôtel montre le Vitraux représentant le fleuve Congo, Bar de L'Espérance, Bruxellesfleuve Congo sur les vitraux du bar.
 
Il faut venir ici pour l’ensemble de la décoration et pas seulement pour les références africaines.
Mobilier, ferronneries et boiseries sont Art déco.
 
Cet ancien hôtel de passe ouvert en 1929 (il y a encore dans le bar la sonnette qui permettait d’alerter les filles lors des descentes de police) à rouvert en septembre 2009. Les chambres ont été rénovées en optant pour une ambiance sobre et contemporaine sauf la grande chambre du premier étage, restaurée à l’identique car son décor est classée Monument Historique (le bar l'est aussi).
 
Bar de L'Espérance, Bruxelles Bar de L'Espérance, Bruxelles Bar de L'Espérance, Bruxelles
 
 

Des églises singulières

Place de l’Altitude cent, l’église Saint-Augustin glorifie Dieu… et le béton armé. Construite dans les années 30, cette église symétrique, de plan centré en croix grecque insérée dans un cercle est surmontée d’une grande tour-phare.
L’église Saint-Jean-Baptiste édifiée en 1931-32 est aussi en béton armé.
 
La Basilique nationale du Sacré-Cœur à Koekelberg impose sa taille impressionnante dans le paysage bruxellois. Ce manifeste de l’Art déco religieux est la cinquième plus grande église du monde. Si les travaux commencèrent en 1926, il faudra attendre une soixantaine d’années pour voir le chantier terminé. On peut monter dans la galerie entourant la coupole et admirer le beau panorama sur Bruxelles.
 
Confessionnal Art déco, église Sainte-Croix, BruxellesL’Eglise de l’abbaye Notre-Dame-de-la-Cambre abrite un chemin de croix réalisé par Anto Carte (il a aussi réalisé des vitraux à la basilique Koekelberg).
 
Dans l’église Sainte-Croix (à côté de Flagey), les bas-côtés sont rythmés par des confessionnaux Art déco.
 
L’église Sainte-Suzanne reste une curiosité. C’est la première de Bruxelles construite en béton armé. Elle fut édifiée dans la seconde partie des années 20 à Schaerbeek (avenue des Glucines) en mémoire de la fille unique d’un général, morte en 1914 à l’âge de 20 ans. Est-ce en l’honneur de cette jeune fille que la façade est rehaussée de rose ?
C'est en tout cas pour accompagner le fort sentiment patriotique qui fédérait la Belgique à cette époque-là que le pavage intérieur est noir, jaune et rouge : les couleurs du drapeau national.
 
 

Et encore de l’Art déco !

Allez boire un verre et écoutez du jazz sur une des banquettes en velours aux motifs géométriques de l’Archiduc, près de la bourse, Confessionnal Art déco, église Sainte-Croix, Bruxellesrue Antoine Dansaert.
L’art Déco joue ici sur des courbes avec raffinement.
L’endroit, ouvert en 1937, n’est pas grand, mais comme souvent à Bruxelles très chaleureux.
 
 
Au 10 rue de la vierge Noire, « la vierge noire » est certainement le restaurant au décor Art déco le plus spectaculaire. Il était fermé lors de notre passage … Il ne semble pas avoir rouvert.
 
 
Le Cloakarium « collectionne le temps » (comme il dit) de l’époque Art déco. Ce musée privé possède plus de mille pendules de cheminée en faïence typiques des années 20 et 30. Ces objets de décoration étaient très à la mode à cette époque-là dans le Nord de la France et en Belgique. Le musée est installé dans une maison Art déco.
 
 
Visitez la capitale belge avec « Promenades Art déco à Bruxelles ». Ce guide très fourni, écrit par Cécile Dubois, propose six promenades (éditions Racine).
 
 
Hôtel des colonies, BruxellesL’association Voir et Dire Bruxelles organise une biennale de l’Art Nouveau pour découvrir des intérieurs bruxellois authentiques et d’habitude fermés au public.
Depuis 2009, cette biennale s’étend aussi à l’Art Déco.
L’association propose également des visites guidées sur l’Art déco tout au long de l’année en fédérant les programmes de plusieurs associations de tourisme culturel (Arkadia et Itinéraires, entre autre).
 
 
Les antiquaires et le marché des antiquités du quartier des Sablons exposent de nombreux objets et meubles Art déco.
L'hôtel des Colonies et le Crowne Plazza (ex Palace) conservent des décors Art déco. Les façades de l'Art hôtel Siru sont un bel exemple de vocabulaire Art déco.
 
Pour préparer un séjour à Bruxelles, allez voir le site de l'Office du Tourisme (et pour un voyage plus large en Belgique celui de l'Office Belge de Tourisme Wallonie-Bruxelles). De Paris, Amsterdam et Cologne, on rejoint facilement et rapidement Bruxelles grâce à Thalys.
 
 Détail Art deco, Maison des Tranwaymen, 17 rue du Poinçon, Bruxelles
 
(Photos : Ludovic Dunod, Michel de Bray, Bruno Brioni, Georges de Kinder)

 

1 Comments

Merci et bravo pour cette page très complète. Montrer l'importance de l'art déco dans une ville très marquée par l'art nouveau n'est pas évident, et trouver ce genre de sites très précis fait plaisir.
Encore bravo !

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