Voyager est un art pluriel. Chacun le conçoit avec ses propres images, ses propres rêves, ses propres attentes. Il y a un monde entre un « voyage organisé » et une longue pérégrination solitaire. Un monde qu’on tente de réunir en proposant à nos auditeurs, lecteurs et internautes de partir avec nous sur des chemins de cultures, de découvertes, de rencontres... Sans à priori, curieux et avides de partage pour mieux connaître la planète. On trouve ici nos émissions, des bonus, nos humeurs, des photos, des films... un simple rendez-vous des voyageurs! NOUS ECRIRE
13 sept. 2013 - 13:45
Gens de Garonne, jamais loin de mon fleuve
Le plus court et le moins connu des grands fleuves français est certainement le plus capricieux. Ses crues et inondations rythment depuis toujours la vie des gens d’ici. Mais peu importe les désagréments. Dans le Val de Garonne, on a le fleuve chevillé au cœur. Même les pieds dans l’eau, on reste vivre ici, captivé par un cours d’eau aux humeurs changeantes. Faites un détour par ce coin du Lot-et-Garonne pour rencontrer des personnes accueillantes et passionnées. C'est aussi l'occasion de sillonner une belle campagne et de goûter aux produits maraîchers de ce jardin de la France.
Entre Meilhan, Marmande et Tonneins, on l’appelle Garonne. Dans ce coin de France, pas d’article pour définir un fleuve. Le nom propre se transforme en prénom. Le cours d’eau devient presque une personne. A écouter les gens d’ici, Garonne est sauvage et secrète, tempétueuse et indolente, imprévisible. C’est un tempérament qui ne se fait jamais oublier, s’imposant des les champs, les rues et les maisons en hiver quand elle sort de son lit.
Si ce caractère singulier fatigue quelquefois les habitants du Val de Garonne dans le Lot-et-Garonne, jamais ils ne se fâchent ou s’en détourne. Bien au contraire, ils l’aiment Garonne. Ils la redécouvrent même.
En voyageant par ici, on ne nous parle pas d’un cours d’eau mais d’un monstre sacré.
A Couthures-sur-Garonne un centre d’interprétation original et touchant, « Gens de Garonne », raconte ces liens étroits, sentimentaux et irrationnels.
Tout autour le paysage invite à la balade et à croquer d’excellents fruits et légumes.
Ecoutez (ou téléchargez) l’émission que nous avons réalisée dans le Lot-et-Garonne :
Un fleuve sauvage
Depuis l’Antiquité, Garonne est un axe de communication majeur du Sud-Ouest. Au XVIIIè siècle, elle devient même une véritable autoroute qui transporte les marchandises de Toulouse à Bordeaux, à bord de bateaux en bois à fond plat, appelés « mioles ».
Mais le fleuve est incertain et la navigation difficile. En été, les eaux sont si basses que les bateaux risquent à tout moment de s’échouer dans des bancs de galets. En hiver, les flots tumultueux rendent dangereuse toute circulation. Les efforts pour tenter de canaliser le fleuve sont vains. Garonne ne se laisse pas dompter facilement !
Les hommes, trop tributaires des ses caprices, s’en détournent et construisent en parallèle, au XIXè siècle, un canal pour assurer une navigation sûre et pérenne.
La construction de la ligne de chemin de fer, quelques années plus tard, sonne le glas pour Garonne qui n’a plus d’intérêt commercial. Ingrats, les hommes s’en détournent, et l’oublie.
Aujourd’hui, quelques passionnés ont reconstitué des mioles et emmènent le public sur le fleuve comme autrefois.
On peut aussi embarquer pour une des visites thématiques proposées par le site « Gens de Garonne ». A l’aube, à l’heure du déjeuner ou de nuit, on prend place sur l’un des bateaux en aluminium aux côtés des sauveteurs de Couthures-sur-Garonne pour découvrir l’histoire, les anecdotes, mais surtout les visages du fleuve.
On peut aussi embarquer pour une des visites thématiques proposées par le site « Gens de Garonne ». A l’aube, à l’heure du déjeuner ou de nuit, on prend place sur l’un des bateaux en aluminium aux côtés des sauveteurs de Couthures-sur-Garonne pour découvrir l’histoire, les anecdotes, mais surtout les visages du fleuve.
Il est changeant comme nous l’explique Georges Lot, géographe, spécialiste de Garonne (et kayakiste ;-) :
De l’eau, on aperçoit les villages si vulnérables l’hiver. Les berges sont sauvages et quasiment inaccessibles à pied, tellement la végétation est dense. Quelques jolies plages de galets ponctuent la balade. Grues, ragondins, grenouilles ou libellules accompagnent aussi la sortie.
Mais qui est Garonne ? Georges Lot nous en devoile la carte d’identité :
Pour une promenade plus intime sur Garonne, il faut prendre un Canoë. On avance au rythme et au son des pagaies. C’est une bonne manière d’être en communion avec la nature et de sentir la puissance du fleuve.
Au départ de Couthures-sur-Garonne, le sentier de randonnée "Couthures, la promenade des Gens de Garonne", longe les digues sur 4,7 km et permet également d’aller à la rencontre des ces paysages.
On peut aussi enfourcher un vélo et partir le long de la voie verte qui suit le canal.
Des crues spectaculaires
Comme nous l’a expliqué Georges Lot, Garonne est une gouttière. C’est la métaphore que les gens d’ici aiment utiliser pour expliquer le phénomène des inondations et des crues régulières qui agitent la vie du fleuve et de ses riverains. Garonne collecte les eaux venant des Pyrénées et du Massif Central. Alors quand il pleut trop… la gouttière déborde !
Heureusement dans le Lot-et-Garonne, le fleuve prend ses aises dans une très large vallée. En hiver ou au printemps, elle peut se transformer en un vaste lac de plusieurs kilomètres, submergeant champs, villages et fermes !
Le courant principal de Garonne peut être rapide et vigoureux, mais les crues n’ont pas ici la violence qu’on peut leur connaître ailleurs.
L’eau s’étale plus tranquillement mais de façon spectaculaire.
Ecoutez cet habitant ayant vécu la grande crue de 1981 :
1875, 1930, 1952, 1981, 2009… A Couthures-sur-Garonne, les crues sont fréquentes et toutes différentes. En 1930, l’eau est montée jusqu’à un mètre vingt dans le village –qui est pourtant à plus de six mètres au-dessus du niveau normal des eaux !
Les mouvements d’humeur de Garonne sont un vrai spectacle que personne ne manquent ici. En temps de crue, les habitants viennent observer le fleuve et faire des pronostics sur son évolution. Leur flair ne les trompe pas. Ils « sentent » quand Garonne va monter.
Ils ont déjà tous été pris par les eaux, bloqués dans leur maison et isolés du reste du monde pendant un, deux, jusqu’à quinze jours !
La crue n’a pas tué depuis 1930, mais elle oblige les habitants en zone inondable (ils sont nombreux) à s’adapter au risque. Ils y sont habitués, s’en amusent et en parle avec poésie. Cette attitude étonne plus d’un voyageur.
Toutes les maisons ont des étages, ce qui permet d’y déménager le mobilier quand l’eau monte. Autrefois, on suspendait même les armoires au plafond avec des crochets et des cordes. Chaque maison a installé les prises électriques en hauteur et le disjoncteur au grenier. On garde des réserves de nourriture et d’eau, des piles pour la radio, un réchaud... De quoi vivre le temps des inondations.
Le village de Couthures-sur-Garonne est l’un des rare à avoir une équipe de sauveteurs. Avec leurs trois bateaux à moteur, ils sillonnent le village et ses environs pour porter assistance aux personnes prisonnières dans leur maison.
Les hommes ont toujours cherché à canaliser ces crues et à en minimiser les dégâts. Il y a trois siècles déjà, ils construisaient des digues en terre et cherchaient par tous les moyens à surélever les maisons et les villages. De gros efforts pour de maigres résultats. Au XXIè siècle, Garonne continue d’en faire qu’à sa tête et impose sa loi !
La maison des gens de Garonne
Couthures-sur-Garonne est l’un des ces villages dont le destin a toujours été lié au fleuve.
Au XIXè siècle, ils étaient quelques 2 000 personnes dans le bourg, aujourd’hui, ils ne sont plus que 400, dont la très grande majorité vit en zone inondable.
Le village a longtemps été aussi une halte pour tous les bateaux qui sillonnaient le fleuve.
Quels que soient les aléas, économiques ou naturels, les Couthurains n’ont jamais quitté leur fleuve des yeux.
C’est cet attachement que raconte le centre d’interprétation « Gens de Garonne », né en 2006 en surplomb des eaux. Il se partage en plusieurs espaces.
La principale animation est un ciné-spectacle pour lequel tout le village s’est investi. Il s’inspire des histoires de chacun. Le salon de l’ancien coiffeur de Couthures-sur-Garonne sert de décor au récit porté par des voix, des images, des personnages virtuels et des effets spéciaux. C’est un spectacle réalisé avec beaucoup de talent, d’émotion et de poésie qui emmène le visiteur dans l’intimité du village, son quotidien, son histoire.
A deux pas, « alerte à la crue » présente une maquette du village qui prend progressivement l’eau pour expliquer de façon pédagogique le phénomène des crues, leurs causes et leurs conséquences.
Enfin, le visiteur peut s’installer dans une réplique de miole pour suivre le fil du fleuve et voir sa vie sauvage à travers un film en 3D.
Avant ou après ces découvertes multimédia, un sentier d’interprétation invite à une balade dans les rues de Couthures. Il passe par la place de la cale (où tout le village vient surveiller le fleuve en temps de crue). Elle domine Garonne. Un canon est encore posté sur un parapet. Il permettait autrefois d’avertir les villageois de la montée des eaux. Sur le mur de la Poste et de l’église, des plaques indiquent les records des inondations.
L’ancienne corderie du village évoque le temps où personne (mariniers, commerçants ou agriculteurs) ne pouvait se passer de cordage. Les outils anciens sont encore en place. Des guides expliquent comment on fabriquait ces accessoires si importants.
Suivez Clarice Franc à la corderie, médiatrice scientifique à « Gens de Garonne » :
Marmande redécouvre son fleuve
Marmande, la grande ville du Val de Garonne, a elle aussi été longtemps près du fleuve. Mais avec le déclin de la marine, la ville s’est détournée de Garonne. Depuis quelques années, la municipalité a pris conscience des atouts touristiques du fleuve et s’est lancée dans un programme de reconquête des berges.
Tout d’abord avec l’aménagement de la plaine de la Filhole, un large terrain qui sépare la ville du bord de l’eau. Classée zone inondable, cette parcelle était à l’abandon et inconstructible. La municipalité a choisi d’y aménager un immense parc public de plus de cent hectares dans lequel on peut venir se promener, faire du jogging, du vélo, du poney ou partager un pique-nique…
C’est au creux de ce bel écrin de nature, qu’une jolie plage de sable est accessible l’été le long de Garonne. C’est une véritable révolution quand on pense que les gens de Garonne ne se baignaient plus dans le fleuve depuis des lustres.
Jean Guérard, premier adjoint au maire de Marmande est fier de cet équipement estival :
Depuis 1997, Marmande accueille aussi le festival Garorock. Ses scènes sont installées près du fleuve avec une programmation rock et électro. Plus de 50 000 spectateurs suivent ces concerts début juillet le temps d’un week-end.
On ne peut pas quitter Marmande sans visiter son charmant centre historique avec ses anciens couvents, églises, cloîtres, hôtels particuliers et maisons à colombages. La chapelle Saint-Benoît abrite un étonnant plafond baroque entièrement peint et un retable tout aussi exubérant.
Le val de Garonne, un des jardins de la France
Marmande est connue pour ses tomates ! Charnues, rouges, juteuses, c’est un délice.
Mais ce terroir est aussi celui des vignobles, des vergers et des maraîchers.
Grâce au réseau « les fermes de Garonne », on peut visiter des exploitations, goûter aux produits locaux et rencontrer les agriculteurs qui proposent de la vente directe.
Les agriculteurs de la vallée sont particulièrement avantagés par Garonne comme le rappelle Georges Lot, géographe (et tant pis s’ils perdent toute la récolte certaines années …) :
Si les matelots se sont détournés du fleuve après le XIXè siècle, les agriculteurs sont toujours restés fidèles à Garonne, avec laquelle ils entretiennent un double lien.
Qu’ils soient dans la plaine alluviale inondable ou sur les coteaux, ces paysans ont besoin du fleuve pour irriguer leurs terres. Tout un système de canalisations permet d’arroser les cultures. En pompant cette eau, certains agriculteurs prennent conscience de la fragilité de leur ressource, notamment l’été lorsque Garonne est presque à sec. Les plus sensibles choisissent alors de pratiquer une agriculture raisonnée pour ne pas gaspiller ce bien précieux. Certains vont même jusqu’à adopter l’agriculture biologique pour éviter de déverser des produits chimiques polluants.
Informations pratiques
Pour préparer un séjour dans le Lot-et-Garonne et en savoir plus sur la destination, regardez le site Du Comité Départemental du Tourisme ainsi que celui de l’Office de Tourisme du Val de Garonne.
Spécial coup de cœur pour La Houeyte, maison d’hôte installée dans une vieille ferme traditionnelle pittoresque, près de Couthures-sur-Garonne (en zone inondables ;-).
Décoration soignée, accueil chaleureux et bons paniers pique-nique. Que demander de plus ?
Page réalisée avec Alice Milot
Photos : Alice Milot / CDT47 / Pierre Lavergne, service communication, ville de Marmande / OTVG / Gil Lefauconnier / Teddy Morrelec / Gens de Garonne.
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2 Comments
Les Gens de Couhures ont pour la première fois le 17 avril 2014 évoqué une période de 1614 . Vidéo en cliquant sur le lien ci-dessous. Comme les bénévoles de Couthures s'est un travail d'amateur mais l'amour de Garonne est toujours pr"sent dans ce village de "pêcheurs"
http://www.marmandeinfo.com/2014/05/couthures-1614-2014.html
On retrouve bien l'ambiance de ce Val de Garonne.
Bravo pour tout ce qui a permis de retrouver le fleuve depuis plus d'une décennie.
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